Des affiches mettant en scène un client en train de lire un catalogue sur les toilettes envahissent la Suisse romande. Communication efficace? Pas sûr, affirment deux spécialistes.

C’est le passage sur le trône le moins discret du moment. Depuis le 28 février, des affiches qui mettent en scène un client lisant un catalogue de l’entreprise de vente par correspondance VAC ont envahi les murs de plusieurs grandes villes romandes.

Des affiches qui créent le buzz

Au nombre de 370, ces images publicitaires suscitent des réactions contrastées. Entre ceux qui les trouvent affligeantes et ceux qui applaudissent leur audace, les discussions enflammées abondent dans les rues ou sur le Net.

Une entreprise qui se présente sur les toilettes

Président de l’agence de publicité Saatchi & Saatchi Suisse, Pedro Simko n’appartient pas au camp des convaincus. «Une entreprise qui se présente sur les toilettes, ça vous attire, vous?», assène le célèbre publicitaire. S’il estime que la pub va attirer du monde sur le site internet de la compagnie, il ne pense pas que ses ventes vont décoller pour autant. «Vous vous voyez dire à vos amis que vous achetez vos produits chez l’entreprise des toilettes?»

On passe tous pour des clowns !

Le responsable communication de «Publicité Romande», l’association faitière de la branche en Suisse romande, est encore plus dur. La campagne est une véritable catastrophe pour lui et ses confrères, estime Hervé Devanthéry: «On passe tous pour des clowns! C’est le degré zéro de la création.» En plus d’être incompréhensible, à ses yeux, l’image
est «du plus mauvais goût» et ne dit rien de l’entreprise qu’elle promeut. Tout juste concède-t-il à VAC la possibilité d’attirer des gens sur son site avec sa stratégie de communication.

Légal ?

Les deux spécialistes s’accordent pour dire que la mise en scène d’un client sur les toilettes n’enfreint aucun loi. «Il est probablement interdit de représenter des actes sexuels, explique Pedro Simko. Les pubs comparatives aussi, sont interdites. Mais globalement, la société pose elle-même les règles de la pub. Si je fais une campagne détestable, personne n’achètera mon produit.» Hervé Devanthéry ajoute: «Il y aussi une autorégulation: par exemple, on évite d’afficher des filles nues pour vendre des voitures.»

Responsable commercial de VAC, à La Chaux-de-Fonds, John Meijer concède que sa campagne est osée. «Elle découle d’un spot publicitaire que nous avons réalisé, avec une boite publicitaire, l’an dernier. Mais l’image d’un monsieur sur les toilettes n’a pas le même impact à la télé ou dans la rue.» De nombreuses discussions ont d’ailleurs eu lieu à l’interne quant à la dégradation éventuelle de l’image de la compagnie à cause de la pub.

Selon lui, les clients réagissent plutôt bien à la campagne: «Des gens nous appellent, certains passent au magasin pour en demander des posters.» Les réactions hostiles ne le dérangent pas plus que ça. Vendant des sex-toys, sa compagnie est de toute façon souvent attaquée par des mères de famille à cheval sur les valeurs, explique-t-il. «Du moment où notre campagne interpelle, c’est qu’elle est réussie» conclut le pro de la vente par correspondance. Il précise qu’avant son coup d’éclat, la compagnie VAC a toujours utilisé un style sobre pour faire parler d’elle. ©R.Pomey – 20minutes.ch